Nouvelle doléance contre le règlement européen sur l’intelligence artificielle : ce vendredi 30 juin, les institutions de l’Union européenne ont reçu une lettre ouverte, signée par près de 150 dirigeants d’entreprises européennes. Ses auteurs déplorent une surrèglementation qui mettrait à mal les ambitions européennes dans le secteur de l’IA.
Le règlement européen sur l’intelligence artificielle n’est pas encore adopté, et pourtant, les plaintes contre le texte continuent de se multiplier. Cette fois, ce sont 150 dirigeants d’entreprises européennes qui ont envoyé à la Commission européenne, au Parlement et aux États membres une lettre ouverte ce vendredi 30 juin. Le texte, pas encore publié, a été lu et commenté par le Financial Times, ce vendredi 30 juin. Parmi les signataires, on trouve Heineken, Siemens, Airbus ou encore Renault qui demandent de ne pas réglementer trop strictement l’intelligence artificielle, et en particulier l’IA générative. La liste exacte des entreprises n’est pas encore connue.
Ce n’est pas la première fois que des sociétés critiquent la future règlementation européenne sur l’IA, en brandissant le risque de surréglementation qui viendrait brider l’innovation. En mai dernier, le PDG d’OpenAI avait prévenu qu’il pourrait« cesser ses activités » en Europe s’il se jugeait incapable de se conformer au Règlement européen sur l’IA, un texte sur lequel il avait « beaucoup » de critiques… avant de faire machine arrière. Mais cette fois, la critique provient d’entreprises européennes. Dans leur lettre, on peut lire que « le projet de législation mettrait en péril la compétitivité et la souveraineté technologique de l’Europe sans s’attaquer efficacement aux défis auxquels nous sommes et serons confrontés ».
Alors que l’IA offre « la possibilité de rejoindre l’avant-garde technologique », une réglementation trop stricte risquerait de mettre à mal cette éventualité, souligne la lettre, reprise par nos confrères. Les auteurs du texte expliquent être particulièrement préoccupés par les règles relatives à l’IA générative, cette technologie qui permet de générer du texte, du code ou des images. Les règles qui sont actuellement contenues dans le Règlement seraient bien trop « lourdes »pour ces modèles de language, et ce « indépendamment de leurs cas d’utilisation », selon les auteurs de la lettre.
Coût de conformité trop salé, risque de responsabilité disproportionné…
Ces derniers pointent du doigt les nouvelles obligations définies par le Règlement européen, qui auraient un coût bien trop important, selon eux. Les coûts de conformité et les risques de responsabilité sont disproportionnés, déclarent-ils, brossant un tableau noir des conséquences d’une telle règlementation : départ de certaines entreprises, fuite des investisseurs, création d’un « écart de productivité critique » par rapport aux États-Unis…Ces règles risquent de mettre à mal les ambitions technologiques de l’Union européenne plutôt que de favoriser l’innovation, avancent-ils.
« L’Europe ne peut pas se permettre de rester à l’écart ». La lettre évoque aussi une « conformité rigide », et conseille l’exécutif européen de produire une loi qui se limite à de « grands principes dans une approche basée sur le risque ». Elle demande la mise en place d’un organisme de réglementation composé d’experts du secteur afin de contrôler la mise en œuvre de la loi au fur et à mesure que la technologie progresse, expliquent nos confrères.
Ce type de demandes montre que les signataires ne semblent pas avoir lu le texte, a réagi Dragoș Tudorache, l’eurodéputé co-rapporteur du texte, interrogé par le Financial Times. Ces suggestions font déjà partie de la version adoptée par le Parlement européen, a-t-il poursuivi, où l’on trouve « un processus de définition des normes mené par l’industrie, une gouvernance avec l’industrie à la table, et un régime réglementaire léger qui demande de la transparence. Rien d’autre ». Le député européen a ajouté qu’il était regrettable que « le lobby agressif de quelques-uns s’empare d’autres entreprises sérieuses », déplorant que l’initiative « sape malheureusement l’avance indéniable que l’Europe a prise » au niveau mondial en matière de réglementation.
Source :
Financial Times