5 septembre 2021 – 5 septembre 2023. Cela fait deux ans que le
Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD), avec à
sa tête le Colonel Mamadi Doumbouya, préside aux destinées de la Guinée.
Dès les premières heures de la prise du pouvoir, l’ancien commandant du
Groupement des forces spéciales a acquis le soutien populaire à travers des
discours forts et rassurants. Dans la foulée, des consultations nationales ont été
menées avec l’ensemble des couches sociopolitiques et professionnelles pour
tenter de donner un caractère plus inclusif à la transition. Deux ans après, que
peut-on retenir des actions politiques du CNRD ? La synergie de la presse en
ligne fait le diagnostic.
Après neuf mois d’exercice au compte de son nouveau mandat issu d’une réforme
constitutionnelle controversée, le Président Alpha Condé s’est vu renversé au matin
du 5 septembre 2021, par le Colonel Mamadi Doumbouya, commandant du
groupement des forces spéciales. La question du troisième mandat et la « mal
gouvernance » ont été les maitres mots pour légitimer le coup de force.
Au lendemain des évènements de la prise du pouvoir, les nouveaux dirigeants du pays,
ont décident de l’interdiction de sortie à l’ensemble des membres du gouvernement
déchu. Leurs documents de voyage confisqués et les comptes bancaires gelés. Au
même moment, des consultations sont organisées pour définir le contenu de la
transition.
Ainsi, le 27 septembre 2021, une charte de la transition est publiée et approuvée par la
presque totalité des organisations sociopolitiques. Les dispositions relatives à la non
candidature des membres des organes de la transition, au respect des droits et libertés
fondamentaux des citoyens et la fixation par consensus de la durée de la transition,
sont entre autres les garanties qui ont rassuré les acteurs sociopolitiques quant à la
bonne foi du CNRD de mener à bien cette période transitoire.
En octobre de la même année, le Colonel Mamadi Doumbouya, prête serment en
qualité de Président de la transition, Chef de l’Etat. Un mois après, un gouvernement
civil composé de vingt-sept (27) membres est constitué, dirigé alors par l’ancien
fonctionnaire international Mohamed Beavogui.
L’une des mesures phares est la création en décembre 2021, de la Cour de Répression
des Infractions Economiques et Financières (CRIEF). Des poursuites sont
enclenchées contre plusieurs anciens dignitaires pour des faits présumés de
détournement de deniers publics. Il s’agit entre autres de l’ancien Premier ministre
Ibrahima Kassory Fofana, l’ancien Président de l’Assemblée nationale Amadou
Damaro Camara et l’ancien ministre de la défense Dr Mohamed Diané.
Dans sa volonté d’organiser une transition inclusive, des journées de « Vérité et
Pardon » sont organisées sur toute l’étendue du territoire national et dans les
ambassades guinéennes à l’étranger. Cees assises nationales menées entre le 22 mars et
le 29 avril 2022 ont impliqué l’ensemble des couches sociales à l’exception du RPG
qui a décliné l’offre du dialogue.
Toutefois, au terme de six semaines de travaux menés par les membres du Comité
national des assises, dirigé par des chefs religieux, un rapport assorti de 45
recommandations est remis au Président de la transition.
L’opération de récupération des domaines de l’Etat constitue un autre domaine
d’intervention des autorités de la transition. A ce titre, la Cité ministérielle de Donka
et bien d’autres résidences spoliées sont retombées dans le portefeuille du Patrimoine
bâti public.
En juillet 2022, alors qu’il venait de rentrer de l’immersion gouvernementale à
l’interieur du pays, le Premier ministre Mohamed Beavogui s’est rendu en Italie pour
des raisons de santé. Le ministre du commerce Docteur Bernard Goumou a été
désigné pour assurer l’intérim. Un mois après, celui-ci a été confirmé dans la même
fonction. Son prédécesseur aurait rendu démission sans que cela ne soit communiqué
à la place publique.
Fraîchement confirmé, Docteur Bernard Goumou, Premier ministre chef du
gouvernement, en prélude au dialogue politique, a effectué en octobre 2022, une visite
aux partis politiques. La démarche a débouché sur l’ouverture du cadre de dialogue
inter guinéen en novembre, après plusieurs tentatives sans succès au temps de son
prédécesseur.
Ce dialogue devrait permettre d’harmoniser les divergences de vue sur la conduite de
la transition. Placé sous l’autorité du Premier ministre et piloté par trois facilitatrices
guinéennes, ce dialogue s’est déroulé finalement sans la participation des coalitions
politiques du RPG-arc-en-ciel, de l’ANAD et du FNDC politique. Les efforts du
gouvernement pour faire venir les acteurs autour de la table n’ayant pas abouti.
Ces coalitions avaient pour revendications la non prise en compte de leurs préalables
dont entre autres : le respect des dispositions de l’article 77 de la charte de la
transition, la déclaration des biens des membres de la transition, l’arrêt des
harcèlements judiciaires et la levée de l’interdiction des manifestations et la mise en
place d’un dialogue sous la supervision de la CEDEAO et de la communauté
internationale.
Outre ces revendications, les travaux du dialogue se sont poursuivis jusqu’en
décembre 2022. Au total, 35 recommandations y ont résulté et ont été soumis à
l’attention du Président de la transition. Dans le souci de la mise en œuvre desdites
résolutions, un Comité de suivi composé des différentes parties au dialogue a été créé
à la Primature.
Parallèlement aux travaux de ce comité, un autre cadre d’échange a été créé sous la
médiation des chefs religieux. Il n’a pas permis de rapprocher les positions des
coalitions opposées à la conduite du CNRD. Nonobstant, les activistes du FNDC ont
pu recouvrer leur liberté grâce aux bons offices des religieux après plusieurs mois de
détention pour des faits de manifestations non autorisées.
Courant de la même période, un chronogramme dynamique a été établi avec la
CEDEAO fixant la durée de la transition à 2 ans. Ce fut l’aboutissement de longues
tractations qui ont conduit à des manifestations ayant entrainé de graves
conséquences, malgré la mesure d’interdiction.
Durant ces deux dernières années, la conférence des chefs d’Etat de la CEDEAO a
tenu plusieurs sommets pour statuer sur les transitions en cours en Guinée, au Mali et
au Burkina Faso.
Visiblement, la diplomatie souterraine du CNRD l’a emporté sur les nombreuses
sanctions et recommandations imposées aux autorités guinéennes.
En avril 2023, à l’occasion d’une rencontre avec les partenaires sur le niveau
d’exécution du chronogramme de la transition, le ministre de l’Administration du
territoire et de la Décentralisation, a levé un coin de voile sur les implications du
retour à l’ordre constitutionnel. Selon Mory Condé, le budget pour l’exécution des dix
(10) points du chronogramme s’élève à plus de 5 000 milliards de francs guinéens, soit
600 millions de dollars US. La levée de fonds pour le financement de ce budget est
désormais l’objectif recherché par le gouvernement de la transition. Même si le
Premier ministre Goumou a annoncé récemment la mobilisation de 40 millions de
dollars US sur le besoin de 600 millions US.
Babila Kéita
Pour la Synergie de la presse en ligne