En renforçant le blocage des bloqueurs de pub, YouTube est-il hors la loi ?

Après le renforcement de sa politique de blocage des bloqueurs de pub, YouTube fait face à de potentiels gros soucis juridiques. Une plainte a été déposée auprès du régulateur irlandais par un avocat spécialisé dans la protection de la vie privée.

Depuis mi-octobre, YouTube a intensifié la chasse aux bloqueurs de pubs, à tel point que pour de nombreux utilisateurs de par le monde, il est devenu impossible de voir quoi que ce soit sur la plateforme vidéo. Il leur reste deux alternatives : supprimer le bloqueur ou souscrire un abonnement payant.

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Mais la question de la légalité de ce blocage se pose très sérieusement. Alexander Hanff, avocat spécialisé dans la protection de la vie privée, a porté plainte devant la DPC, la commission irlandaise de protection des données — YouTube étant sous la juridiction de ce régulateur, équivalent irlandais de la Cnil. Il accuse le service d’utiliser du code JavaScript pour détecter les extensions d’adblock sans le consentement explicite de l’utilisateur.

Et effectivement, l’article 5 du paragraphe 3 de la directive ePrivacy « Vie privée et communications électroniques » (2002/58/CE) impose un consentement pour tout « accès ou stockage d’informations sur l’appareil d’un utilisateur final qui n’est pas strictement nécessaire ».

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Selon Hanff, le script utilisé par YouTube enfreint donc la directive puisqu’il n’y a aucune demande d’autorisation auprès de l’internaute : le déploiement de ce script ne serait pas nécessaire à la fourniture du service demandé, il sert uniquement les intérêts de la plateforme.

La DPC s’est saisie du dossier et va demander des informations complémentaires à YouTube. Et conformément au règlement européen pour la protection des données (RGPD), la commission irlandaise pourrait exiger du service l’arrêt de la pratique de blocage des bloqueurs de pub.

YouTube débloque

Alexander Hanff va même plus loin : il compare le système de détection des bloqueurs de contenus de YouTube à des « logiciels espion », « il n’y a pas d’autre manière de le décrire et donc il n’est pas acceptable de le déployer sans consentement », affirme-t-il auprès de The Verge. « Je considère que le déploiement d’une technologie qui peut être utilisée pour m’espionner sur les appareils est à la fois contraire à l’éthique et illégal dans la plupart des situations ».

De son côté, YouTube explique que les bloqueurs de contenus enfreint les conditions d’utilisation de la plateforme et empêchent les créateurs de générer des revenus provenant de la publicité. Cette affirmation ne tient pas debout, selon le plaignant qui lui oppose le droit européen qui a effectivement préséance.

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Alexander Hanff ne part pas désarmé au combat. En 2016, il avait obtenu de la Commission européenne la confirmation écrite que les scripts utilisés pour détecter les bloqueurs de pub tombaient bien sous le coup du fameux article de la directive ePrivacy. Néanmoins, l’année suivante la même Commission indiquait qu’un site web pouvait être en mesure de vérifier si un utilisateur se servait d’un adblock, sans consentement.

L’affaire ne fait donc que commencer et les arguties juridiques risquent de se multiplier dans un camp comme dans un autre. En attendant, les internautes vont continuer à installer et désinstaller en masse des bloqueurs de pub !

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Source :

ISP

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