Le Ministre de l’Economie et des Finances entouré de ses proches collaborateurs a participé le jeudi 19 septembre à la demi-journée d’échanges et de partage autour du contenu de la première Note de Conjoncture sur la Guinée produite par une équipe de la Banque Mondiale dirigée par Mme Christina WOODS, Economiste Principale à la Banque Mondiale.
Un atelier de dissémination de cette Note qui a mobilisé à l’initiative de l’équipe pays de la Banque Mondiale, des anciens ministres, des ambassadeurs, représentants des partenaires techniques et financiers du pays, agences et institutions de financement du développement, hauts cadres du MEF et de l’administration, représentants du patronat, acteurs du secteur privé et de la société civile, jeunes entrepreneurs, experts, consultants et universitaires.
Un panel de haut niveau mis a profit par le Ministre de l’Economie et des Finances pour saluer l’initiative de production et de publication de cette note qui corrobore dira-t-il les études et projections stratégiques menées ou commanditées par le Département. Mourana Soumah a mis en exergue les appuis et soutiens de tous ordres du Groupe de la Banque Mondiale à la Guinée au titre de financement de projets et programmes d’investissement, de renforcement de capacités et d’appuis conseils.
Le Chef du Département de l’Economie et des Finances a félicité Mme Christina Woods pour « le travail abattu… le thème de la note de conjoncture portant sur la gestion des ressources pour le développement cadre parfaitement avec les préoccupations des administrations économiques et financières du pays » rajoutera-t-il.
Le Représentant pays de la Banque Mondiale a souligné la pertinence de cette Note Technique. Pour Issa Diaw « Le présent rapport constitue la première édition de la Note de conjoncture économique de la Guinée. Ce rapport annuel présente une vue d’ensemble de l’évolution de la situation macroéconomique de la Guinée, suivie d’une étude approfondie d’un sujet spécifique. Le premier chapitre de cette première édition présente l’évolution économique récente ainsi que les perspectives et risques macroéconomiques. Le deuxième chapitre traite de l’importance de l’agriculture pour la transformation structurelle et la protection de l’économie guinéenne contre les effets du climat. Il comprend également des mesures qui pourraient aider le gouvernement guinéen à favoriser une croissance agricole plus productive, plus inclusive, plus résistante aux risques liés au changement climatique, tout en contribuant moins au changement climatique. » indiquera t il.
Mr Diaw a remercié le Ministre Mourana Soumah pour sa présence à cet atelier de dissémination, salué les invités, les participants et surtout les panelistes, dirigés par l’ancien Premier Kabinet Komara et comprenant entre autres, Dr Mamoudou Touré Secrétaire General du MEF, Mme Yansané Fatou Baldé de la COFEL, Dr Lanciné Sangaré de l’ISAV Faranah, et Mme Aboukalil Amina du Patronat de Guinée.
La présentation des grandes lignes de la Note de Conjoncture économique sur la Guinée par Mme Christina Woods suivi des échanges en panels et des discussions avec les participants a mis un terme à la demi-journée de dissémination.
Service Communication, Relations Publiques MEF
Ci-joint, pour info et partage le résume Exécutif du Document présenté
RESUME EXECUTIF de la NOTE
Le présent rapport constitue la première édition de la Note de conjoncture économique de la Guinée. Ce rapport annuel présente une vue d’ensemble de l’évolution de la situation macroéconomique de la Guinée, suivie d’une étude approfondie d’un sujet spécifique. Le premier chapitre de cette première édition présente l’évolution économique récente ainsi que les perspectives et risques macroéconomiques. Le deuxième chapitre traite de l’importance de l’agriculture pour la transformation structurelle et la protection de l’économie guinéenne contre les effets du climat. Il comprend également des mesures qui pourraient aider le gouvernement guinéen à favoriser une croissance agricole plus productive, plus inclusive, plus résistante aux risques liés au changement climatique, tout en contribuant moins au changement climatique.
Évolution et perspectives macroéconomiques
La croissance s’est accélérée en 2023, soutenue par la forte performance du secteur minier. La croissance du PIB s’est accélérée pour atteindre 7,1 % en 2023 (contre 3,7 % en 2022), la production de bauxite ayant bondi de 22 % sous l’impulsion des exploitants artisanaux et des entreprises du secteur formel. Du côté de la demande, une augmentation des investissements (privés et publics) a alimenté la croissance. L’inflation a ralenti à 9,3 % (en glissement annuel) à la fin de 2023, contre 11,6 % à la fin de 2022, soutenue par des coûts de transport stables et des politiques fiscales et monétaires prudentes.
Cependant, le secteur minier guinéen est faiblement lié à l’économie nationale, et ne contribue donc pas beaucoup à la création d’emplois ou à la réduction de la pauvreté. Dans l’ensemble, la Guinée a connu une expansion économique notable depuis 2016, principalement alimentée par ses exportations minières, mais aussi par une augmentation de la pêche industrielle. Cependant, la faible intégration du secteur minier avec les secteurs non miniers, l’intensité capitalistique du secteur minier et les défis économiques posés par la dynamique du syndrome hollandais entravent la création d’emplois et les avantages économiques plus larges. En outre, les perturbations économiques mondiales causées par la pandémie de COVID-19 et le conflit qui a suivi le début de la guerre de la Russie en Ukraine ont encore freiné la création d’emplois et les efforts de réduction de la pauvreté. Par conséquent, la croissance de la Guinée a eu un impact marginal sur la réduction de la pauvreté, étant donné une baisse plus faible du taux de pauvreté par rapport à la croissance du PIB par habitant.
La gestion budgétaire a permis de réduire les déficits, tandis que la mobilisation et la gestion des ressources dans le secteur minier restent un défi. Au cours de la dernière décennie, la Guinée a généralement maintenu une gestion budgétaire prudente, contribuant à la stabilité macroéconomique. De 2016 à 2023, le gouvernement a renouvelé son engagement en faveur d’une gouvernance macroéconomique saine, ce qui a permis de réduire le déficit budgétaire à une moyenne de 1,4 % par an au cours de cette période. Néanmoins, il est possible d’optimiser l’allocation des dépenses pour stimuler davantage la croissance économique. Du côté des recettes, les recettes fiscales ont été relativement faibles, s’établissant en moyenne à 12,7 % du PIB entre 2016 et 2023. Cette faible performance est principalement liée au secteur minier, les recettes fiscales moyennes provenant de ce secteur ayant diminué de 2,6 % du PIB au cours de la période 2010-2015 à 2,1 % au cours de 2016-2023. La capacité de la Guinée à collecter les recettes minières est limitée par de multiples facteurs, notamment une série d’exonérations fiscales, les prix de transfert (transactions non basées sur les prix du marché entre des sociétés affiliées qui réduisent les bénéfices des sociétés en Guinée), l’insuffisance des capacités technique pour contrôler la qualité et la quantité des produits miniers qui sont produits et exportés, et la capacité de l’administration fiscale à examiner efficacement les états financiers des grandes sociétés multinationales.
La Guinée reste exposée à un risque modéré de surendettement, avec une certaine marge de manœuvre pour absorber les chocs, inchangée par rapport à l’AVD précédente (décembre 2022). Ceci est la conclusion de l’analyse de viabilité de la dette (AVD) du FMI et de la Banque mondiale d’avril 2024. Après avoir diminué ces dernières années, aidée par des politiques budgétaires et monétaires prudentes et un financement budgétaire limité de la banque centrale, la dette publique en pourcentage du PIB a légèrement augmenté à la fin de 2023, reflétant une augmentation de la dette intérieure due à l’émission accrue de titres d’État pour financer les investissements dans les infrastructures publiques. Cette tendance récente est inquiétante et il convient de veiller à éviter une nouvelle augmentation de la dette.
La gestion du secteur extérieur et du taux de change a permis de stabiliser la monnaie, de réduire légèrement l’inflation et de poursuivre l’appréciation du taux de change effectif réel. Les changements dans la balance des comptes courants de la Guinée sont presque totalement expliqués par les exportations liées à l’exploitation minière et les importations et investissements liés à l’IDE. Le déficit du compte courant reste élevé, avec une moyenne annuelle de 10,6 % sur la période 2016-2023. La croissance des exportations, principalement de bauxite et d’or, a été robuste ces dernières années, mais les importations ont également augmenté en raison des IDE dans le secteur minier. La performance du secteur extérieur entre 2016 et 2023, ainsi que l’application d’une règle d’intervention sur le marché des changes, ont contribué à stabiliser le taux de change nominal et à réduire légèrement l’inflation. Néanmoins, le taux de change effectif réel s’est constamment apprécié depuis 2016 et persiste, posant un défi important pour la compétitivité des produits du secteur non minier.
L’exploitation minière devrait continuer à stimuler la croissance économique de la Guinée, tandis que les secteurs non miniers, affectés en 2024 par l’explosion du dépôt de carburant de mi-décembre 2023, se redresseront par la suite. La croissance devrait ralentir à 4,9 % en 2024 (2,4 % par habitant), en partie à cause de l’impact de l’explosion du dépôt de carburant de décembre 2023 sur le secteur non minier. La croissance devrait ensuite s’accélérer pour atteindre une moyenne de 6,3 pour cent en 2025-2026 (en excluant les exportations de la mine de Simandou prévues à la fin de 2025), principalement en raison d’une augmentation des investissements directs étrangers liés à l’exploitation minière. L’inflation ralentirait pour atteindre 8,8 % en 2024 et 8,1 % en moyenne en 2025-26, en raison de l’allègement des contraintes d’approvisionnement et de l’amélioration des conditions du réseau routier, ce qui faciliterait la distribution des denrées alimentaires. Une politique monétaire prudente, y compris un financement budgétaire minimal, contribuerait également à atténuer les pressions inflationnistes. Le déficit budgétaire devrait se creuser pour atteindre 2,7 % du PIB en raison de l’augmentation des dépenses d’investissement, mais diminuer pour atteindre 2,1 % en 2025-2026, conformément à des politiques budgétaires prudentes. Le déficit de la balance courante devrait rester élevé en raison de l’augmentation des importations liées à l’IDE. Les risques sont orientés à la baisse car les incertitudes liées à la transition politique avant les élections présidentielles pourraient ralentir la mise en œuvre des réformes, ce qui pourrait réduire l’investissement privé. En revanche, les exportations de Simandou sont attendues pour la fin 2025 et les entrées d’IDE liées à l’exploitation minière pourraient augmenter, reflétant les nouveaux projets prévus.
Il est nécessaire, même si pas suffisant, d’inverser les pertes de compétitivité pour stimuler le développement du secteur non minier et, par conséquent, la création d’emplois et la croissance inclusive. Cela nécessite de maintenir la stabilité de la dette publique, d’améliorer la mobilisation et la gestion des recettes intérieures, et de donner la priorité aux mesures d’amélioration de la productivité qui élargissent l’accès aux services liés au capital physique (électricité, routes de qualité et télécommunications numériques) et aux services liés au capital humain (protection sociale, santé et éducation) et qui relient le changement climatique aux objectifs de développement.
L’importance de l’agriculture pour la transformation structurelle et la protection de l’économie guinéenne contre les effets du changement climatique
La gestion des ressources naturelles est essentielle au développement à long terme de la Guinée. La Guinée dispose de ressources naturelles abondantes, d’une population croissante et d’une situation géographique privilégiée, ce qui lui confère un important potentiel inexploité de création de richesses inclusives. Cependant, le changement climatique – notamment la hausse des températures et la variabilité accrue des précipitations – a un impact négatif sur le potentiel de création de richesses de la Guinée, amplifiant les risques pour une croissance durable et affaiblissant la résilience aux chocs induits par le climat. La Guinée est le 24th pays le plus vulnérable et le 148th pays le plus prêt selon le classement de l’indice pays ND-GAIN. Lorsque l’on relie le changement climatique et la croissance sous l’angle du cadre de l’Évolution des richesses des nations, une gestion efficace des ressources apparaît comme vitale pour permettre une croissance inclusive et durable. L’agriculture (c’est-à-dire la production végétale, l’élevage et la pêche) peut jouer un rôle clé en tant que levier pour la transformation structurelle, mais elle doit être adaptée au climat. Cela est également essentiel pour favoriser la résilience à la dynamique du syndrome hollandais, typique d’une croissance économique fondée sur les industries extractives, et donc pour permettre la diversification.
L’agriculture possède un énorme potentiel de croissance inclusive, tout en jouant un rôle central dans la protection de l’économie guinéenne contre les effets du changement climatique. L‘agriculture (y compris l’élevage, l’aquaculture et la sylviculture) contribue à hauteur de 27,8 % au PIB national et emploie 53 % de la population. Les principales variables du changement climatique – hausse des températures, diminution des précipitations, augmentation de la variabilité des précipitations et élévation du niveau de la mer – ont un impact direct sur la productivité de l’agriculture et sur les moyens de subsistance de la plupart des Guinéens. Dans le même temps, les émissions globales de la Guinée sont faibles, moins de 0,01 pour cent des émissions mondiales en 2019, mais elles proviennent principalement de l’agriculture, de l’élevage et de l’aquaculture (52 pour cent) et de l’utilisation des terres et de la sylviculture (30 pour cent).
Le dernier modèle élaboré par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) indique que la Guinée connaîtra d’importants changements au niveau de la température moyenne, des précipitations et de l’élévation du niveau de la mer, ce qui aura des répercussions significatives sur l’agriculture. Les périodes de forte chaleur seront plus intenses dans les régions du nord et du nord-ouest du pays. Les précipitations annuelles moyennes diminueront, entraînant une saison des pluies retardée, plus courte et plus intense. Des tempêtes intenses plus fréquentes augmenteraient le risque d’inondations et de glissements de terrain, ce qui aurait un impact sur la productivité agricole, l’accessibilité des marchés, la capacité de production d’hydroélectricité et la qualité du réseau routier. Le niveau de la mer devrait s’élever, inondant les marais côtiers et les communautés.
En l’absence de mesures appropriées, la productivité agricole pourrait diminuer à long terme, jusqu’à 25 %, ce qui aurait un impact négatif sur la croissance inclusive et la sécurité alimentaire. Une étude récente sur les pays d’Afrique de l’Ouest attribue environ 40 % de la variation de la productivité des terres cultivées à l’effet combiné des précipitations, de la température de la surface des terres et du rayonnement solaire, ce qui laisse entrevoir d’importants avantages pour la croissance de la productivité si les risques liés au changement climatique sont réduits.
L’agriculture guinéenne doit passer de modes de production de subsistance à des pratiques intensives axées sur la productivité, afin de renforcer la compétitivité, la résilience climatique et la sécurité alimentaire. La subsistance caractérise environ 90 pour cent des activités agricoles, les 10 pour cent restants étant des productions à vocation commerciale. La faible connectivité aux marchés est un facteur de hausse de l’inflation, en partie en raison de la hausse des coûts alimentaires dans les paniers de consommation, que la Guinée connaît par rapport à ses voisins et qui entravent une réduction plus rapide de la pauvreté. La dynamique du syndrome hollandais, qui rend les aliments importés plus attrayants que les produits nationaux, entrave encore davantage les investissements nécessaires à une agriculture plus productive et aux secteurs agro-industriels.
La Guinée a publié sa contribution déterminée au niveau national (CDN) en 2021 et a commencé à mettre en place les éléments de base pour participer au financement du climat et du carbone. Un budget total de 13,8 milliards de dollars américain est indiqué comme étant nécessaire jusqu’en 2030 pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions. Pour atteindre l’objectif du pays de parvenir à zéro émission nette d’ici 2050, des cibles spécifiques de réduction nette des GES pour l’agriculture par rapport au scénario de référence seront fixées en 2024. Les mesures comprendront l’identification de pratiques durables et à faible émission de carbone pour la culture du riz, la gestion des résidus de l’élevage et le brûlage des savanes. Des systèmes alternatifs de pompage sans carbone (électricité, énergie solaire et éolienne) remplaceront les pratiques à forte intensité de terre et de carbone actuellement en place dans la plupart des localités rurales. En ce qui concerne l’adaptation, les actions prioritaires identifiées par la Guinée comprennent l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action de la politique nationale de l’eau (PNE), la conception et l’application de mesures de protection, de conservation et de gestion des écosystèmes, le renforcement de la résilience de la zone côtière et le soutien aux communautés rurales pour qu’elles s’adaptent aux effets du climat.
La CDN n’a pas encore précisé comment les ressources seraient mobilisées, financées, allouées ou comment les dommages par secteur sont estimés. La Guinée a publié un Plan d’investissement et de partenariat de la CDN, qui s’appuie sur les investissements prévus dans le cadre des budgets de l’État et des collectivités locales et qui vise à mobiliser des financements auprès de partenaires extérieurs et du secteur privé. Pourtant, le Plan d’investissement et de partenariat de la CDN, publié à la suite de la CDN (2021), prévoit un budget minimum préliminaire de 1 milliard de dollars américain, ce qui laisse un déficit de financement d’environ 11,6 milliards de dollars.
Les actions politiques qui pourraient aider les autorités guinéennes à favoriser une croissance agricole inclusive, plus résiliente aux risques liés au changement climatique, tout en contribuant moins au changement climatique, comprennent : donner la priorité aux réformes politiques et aux investissements dans les secteurs les plus vulnérables ; repenser les subventions aux intrants agricoles (principalement l’utilisation de l’eau et des engrais) pour soutenir l’adoption de pratiques de production agricole résilientes au climat et d’approches visant à réduire les pertes après récolte ; réhabiliter et moderniser les infrastructures d’irrigation ; investir dans les infrastructures de mobilisation de l’eau ; établir des mécanismes pour faciliter la transformation de l’agriculture et des systèmes alimentaires de subsistance en systèmes orientés vers le marché ; investir dans des pratiques forestières durables, telles que le reboisement et le boisement ; et moderniser les infrastructures routières et électriques pour qu’elles répondent aux normes de conception résilientes au changement climatique.
Source service COM Banque Mondiale Guinée
Zubah Emmanuel Flomo Beavogui <zbeavogui@worldbankgroup.org>