
Ce mardi 15 avril, la justice française a confirmé que l’Arcom, le gendarme de l’audiovisuel et du numérique, était en droit de demander le blocage d’un site pornographique à un fournisseur de service internet, si ce dernier n’avait mis en place aucun dispositif de vérification de l’âge de ses visiteurs allant plus loin qu’une simple déclaration de majorité.
La justice confirme pour la première fois que l’Arcom, le nouveau gendarme du Numérique, est bien en droit de demander le blocage de sites pornographiques à des fournisseurs de service internet. Ce mardi 15 avril, un arrêt du tribunal administratif de Paris a estimé que cette autorité pouvait demander à un fournisseur d’accès à internet ou de services internet de rendre tel site X inaccessible, si aucun dispositif de vérification de l’âge autre qu’une simple déclaration de majorité n’avait été mis en place.
Dans cette affaire, Cloudflare, un fournisseur de systèmes de résolution de noms de domaine, avait reçu une demande de blocage, le 6 mars dernier, qui concernait Camschat – une plateforme de vidéos pornographiques. Le président de l’Arcom, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, lui demandait de couper cet accès dans un délai de 48 heures, et pour une durée de deux ans. Les utilisateurs devaient être redirigés vers une page d’information de l’Arcom.
Des autorités françaises pas compétentes, selon Cloudflare
Pourquoi un tel blocage ? Le site X se contentait, pour vérifier que ses visiteurs français étaient bien majeurs, d’une simple déclaration de majorité. Or depuis la loi SREN (visant à sécuriser et à réguler l’espace numérique) et le référentiel technique publié par l’Arcom en octobre 2024, les plateformes pornographiques sont contraintes d’aller plus loin dans cette vérification, en mettant en place des « exigences techniques minimales applicables aux systèmes de vérification de l’âge » comme l’envoi d’un selfie ou d’une pièce d’identité. Les sites X récalcitrants risquent une amende pouvant aller jusqu’à 4 % de leur chiffre d’affaires mondial, et le blocage de leurs sites par les fournisseurs d’accès ou de services Internet.
La demande de blocage était ici contestée devant le juge administratif, au motif que les autorités françaises n’étaient pas compétentes pour ce sujet. Ces dernières devaient être dessaisies au profit de Bruxelles, en vertu du DSA, le règlement européen sur les services numériques, plaidait en substance Cloudflare.
Un blocage jugé « adapté, nécessaire et proportionné »
Les juges administratifs ont rejeté le recours, en rappelant que l’autorité française cherchait avant tout à empêcher les mineurs français d’avoir accès à des contenus pornographiques. Or le dispositif de blocage a été jugé « adapté, nécessaire et proportionné à l’objectif poursuivi ». Résultat : l‘Arcom était en droit de faire une demande, même si la plateforme X en question n’est pas domiciliée en France. Le juge administratif a aussi précisé que la France pouvait, sur ce sujet, « édicter des lois complémentaires au règlement européen sur les services numériques », le DSA, qui s’appliqueront aux mineurs établis dans l’Hexagone. Notamment parce que la plateforme n’est pas considérée comme une « très grande plateforme en ligne », une catégorie définie et régie par ce règlement européen.
Depuis le vendredi 11 avril, les sites X domiciliés en France et hors de l’Union européenne (UE) doivent mettre en œuvre un système de vérification d’âge définitif, à la fois « respectueux de la vie privée » et « efficace », sous peine de sanctions pouvant aller jusqu’à leur blocage. Ils ont l’obligation de proposer une solution définitive autre que la vérification par la carte bancaire, avec au moins un dispositif de vérification d’âge en « double anonymat ».
Pour les plateformes pornographiques domiciliées au sein de l’UE, le délai est un peu plus long. Conformément à un arrêté publié le 6 mars 2025 au Journal officiel qui listait les sites concernés, YouPorn, PornHub, RedTube, TukxHamster (domiciliés à Chypre), Jacquie et Michel (Hongrie et Espagne), XNXX et Xvidéos (République tchèque) et Tukif (Portugal) ont trois mois, soit jusqu’au 6 juin 2025, pour mettre en place un système de vérification de l’âge conforme au référentiel de l’Arcom.
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Source :
Arrêt du tribunal administratif de Paris du 15 avril 2025